Le principe de base : l’article 1384 de notre Code civil.
Le Code civil est clair : une personne est responsable non seulement des dégâts commis par elle-même, mais également de ceux commis par une personne placée sous sa responsabilité. Quiconque (comme l’hôpital) a engagé quelqu’un est responsable des dégâts commis par son personnel (ici : l’infirmier) dans l’exercice de ses activités.
Dans notre cas fictif, cela signifie concrètement que la victime peut se plaindre devant les tribunaux, mais elle doit apporter la preuve que celui qu’elle accuse a effectivement le statut d’employeur (ou "patron") et qu’il existe un lien de subordination entre l’employeur et la personne engagée. Cette subordination existe dès qu’une personne exerce autorité et contrôle sur les actes d’une autre. Naturellement, la victime doit aussi prouver que la personne engagée (l’infirmier) a commis une erreur ayant provoqué l’accident, durant les occupations pour lesquelles elle a été engagée.
Que dit la jurisprudence ?
Pour répondre à cette question, prenons un cas récent. Bernadette (nom d’emprunt) rencontre un infirmier dans le couloir de l’hôpital et pour discuter un peu, s’assied sur une chaise à roulettes. Ayant la jambe dans le plâtre, ce n’est certainement pas le meilleur choix, mais l’infirmier n’y prend garde et à aucun moment, n’avertit Bernadette du risque qu’elle court sur cette chaise. Il est à signaler que Bernadette n’est pas aux soins à cet instant : c’est simplement une conversation qui s’engage entre deux personnes, dans le couloir. Après quelques minutes, Bernadette se lève, la chaise glisse soudainement, la dame tombe et se fait mal.
Elle estime que l’infirmier a commis une erreur et tient l’hôpital (en qualité d’employeur) responsable des dommages subis. En l’absence d’accord à l’amiable, Bernadette traîne l’affaire devant les tribunaux.
Selon elle, que l’accident se soit passé lors d’une simple conversation avec l’infirmier n’enlève rien à l’erreur commise par celui-ci en ne l’avertissant pas des risques encourus en s’asseyant sur la chaise à roulettes. D’après elle, l’infirmier aurait dû l’en avertir.
Le juge n’est cependant pas de son avis et rejette son action en justice. Selon lui, Bernadette ne parvient pas à prouver réellement que l’infirmier a commis une infraction à la "norme générale de précaution", en tenant compte des circonstances concrètes au moment où s’est produit l’accident. Selon le juge, l’infirmier ne s’est pas comporté différemment que ne l’aurait fait un autre infirmier dans les mêmes circonstances. Il estime en outre que l’infirmier n’a commis aucun acte coupable. De ce fait, ni l’hôpital, ni son personnel ne sont responsables des blessures de Bernadette.
(Solange Tastenoye)